Aujourd'hui, seule la vengeance m'anime. Aujourd'hui, je ne me bats que pour une seule chose, combattre ma sœur et tout ce qui a un rapport avec la division. Mais, il y a tout un chemin avant d'en arriver là. J'ai trente-trois ans aujourd'hui, et toute une vie derrière moi. Je vais vous la raconter. En tout cas, je vais essayer de vous raconter les moments clés qui ont fait de moi la femme que je suis aujourd'hui.

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« Tu vas avoir une petite sœur, ma chérie ? » Quoi ? Je l'avoue, au départ, je n'étais pas très enthousiaste. Après tout, j'avais été habituée pendant neuf ans à être la fille unique. Jill et Jackson étaient les meilleurs parents que tout enfant puisse rêver. Je ne dirais jamais assez à quel point je les remercie et à quel point je les aime. Quoi qu'il en soit, quand ma petite sœur était née, Heaven Zooey Grey, j'avais fini par m'habituer au fait que je ne serais plus seule. Et puis, j'ai bien vu que mes parents nous aimaient autant toutes les deux. Alors, j'ai commencé à me comporter comme une sœur, une véritable grande sœur, voulant la protéger envers et contre tous. Et puis cette sensation de devoir la protéger s'était accentuée quand le quinze juillet mil neuf cent quatre-vingt-douze, notre père avait été assassiné. Une histoire vraiment idiote. Nous étions en vacances en France, et là-bas, ce jour-ci est la fête nationale. Ce qui signifie feux d'artifices, et autres choses dans le genre. Mais il faut croire que toutes les personnes ne voulaient pas uniquement faire la fête, ou plutôt ils avaient trop fait la fête. Il y avait eu une bagarre dans un groupe, et mon père a voulu intervenir car il y avait plusieurs enfants autour. Je suis sûre qu'il n'avait pas prévu qu'un des gars sorte un couteau et lui enfonce en plein cœur. Non, il ne l'avait pas prévu. Et nous ? Nous venions de perdre notre père sous nos yeux. J'avais eu le réflexe de cacher les yeux de Heaven lorsque mon père était intervenu. Je ne savais trop pourquoi, je ne voulais pas qu'elle voit ça. Elle n'avait que trois ans. Je voulais conserver son innocence sans doute. Après cet événement, nous n'étions plus jamais partis en vacances. Et puis, ma mère avait commencé à beaucoup travailler pour continuer à nous offrir ce que l'on souhaitait. Il était beaucoup plus simple de vivre grâce à deux salaires plutôt qu'à un seul. Mais elle devait faire avec, malheureusement.

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J'avais grandi, ma sœur aussi, ma mère avait vieilli. Nous étions toujours toutes les trois. Et puis, pour aider ma mère, j'avais pris un boulot de serveuse en plus du lycée. Mon père me manquait toujours autant, mais j'avais une bonne vie. J'étais bonne élève, j'avais des amis, une famille, et un petit-ami. Liam. Il était mon premier amour. Enfin... Mon deuxième. Puisque j'en suis à vous faire des confidences, je vais vous parler de ce premier amour. Derek Wayde Silvensen. Il était beau, il était fort, il était intelligent mais qu'est-ce qu'il était arrogant et prétentieux. Je l'aimais autant que je le détestais. Et il était dans ma classe. À dire vrai, nous avions passé nos quatre années de lycée dans la même classe. Et nous nous détestions vraiment. « T’es qu’un ptit con arrogant » J’avais immédiatement vu dans son regard que ça ne lui avait pas plu. Pourtant, c'était bien ce que je pensais de lui, il n'y avait aucun doute là-dessus « Et toi, t’es qu’une petite peste prétentieuse » Et il avait raison, c'était le pire. Je le détestais. Je le détestais à un point. « Parfait » et j’avais tourné les talons. Je l’entendis de loin ajouter « Très bien » alors qu'il partait de l'autre côté. Quel idiot ! Oui, un idiot dont j'étais amoureuse malgré tout ce que je pouvais en dire. Il hantait mes pensées. Je devais oublier Derek. Je m'étais donné pour objectif de l'oublier. Cela devait être possible, je n'avais que seize ans après tout. C'est là que Liam était entré en jeu. Lui aussi était incroyablement beau, pas autant que Derek mais tout de même. Et puis, il était si gentil avec moi. Nous étions rapidement sortis ensemble. J'avais mis du temps à l'aimer mais il a fini par y arriver, il a fini par me faire croire que mes sentiments pour Derek n'étaient rien. Pourtant, l'évidence s'était montrée très rapidement : nous n'étions vraiment pas faits pour être ensemble. « Écoutes, c'est fini. » Cette fois, je le savais, c'était la dernière fois que Liam m'énervait comme cela. Je ne pouvais plus le laisser me traiter ainsi. Cela faisait six mois que l'on était ensemble et on arrêtait pas de se disputer. Je n'en pouvais plus. « T'as pas le droit de me quitter. » Je levais les yeux au ciel. Qu'est-ce qu'il allait me sortir ? Mais, soudain, il se fit plus menaçant, il s'approchait de moi avec cet air étrange sur le visage. Du haut de mes dix-sept ans, je voulais me montrer forte mais, au fond, j'avais peur. Je savais qu'il pouvait être violent mais pas envers une femme. « Tu risques de le regretter, ma jolie » Il posa une main sur ma joue. « Ne me touches pas ! » Ma voix était déterminée. Je n'étais pas une jeune femme faible. Peut-être avais-je peur, oui, mais jamais je n'avais été faible. Je savais parfaitement où frapper pour que cela fasse mal. J'avais pris des cours de défense, des sortes de cours de combat, pour m'amuser. « Je crois qu'elle veut que tu la laisses tranquille » Cette voix m'était familière, et je la détestais aussi. Enfin, j'avais fini par l'oublier en tout cas. Je le croyais. J'avais tellement voulu l'oublier. Pendant six mois, je n'y avais pas prêté attention parce que je me croyais bien avec Liam. Ce qui était totalement faux, je l'admets. « Je crois que je fais ce que je veux avec ma copine. » Derek s'était rapproché de nous, et avait empoigné Liam par le bras. « Maintenant, tu dégages. Et si tu t'approches encore d'elle, je serais encore plus méchant ». Je soupirai alors que Liam partait comme un lâche. Lorsque Derek se tourna vers moi, je ne pus m'empêcher de lui dire « Je sais très bien me défendre toute seule ». Il employa alors ce ton arrogant que je haïssais mais qui me faisait aussi fondre. « Oh mais je n'en doute pas. » Pourquoi les adultes disent toujours qu'à cet âge, on ne tombe pas amoureux durablement ? Je peux vous affirmer aujourd'hui qu'ils se trompent tous. Quoi qu'il en soit, Derek m'avait tout de même légèrement souri puis il était parti, me laissant pantoise. Il m'avait défendue...

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Le lycée. C'était la fin. Et, bien sûr, j'avais reçu mon diplôme avec tous mes amis lors de la remise. J'avais vu le visage fier de ma mère rivé sur moi. J'avais regardé le sourire réjouit de ma petite sœur. Et je me sentais heureuse. Je me sentais heureuse de voir que nous étions unies toutes les trois. Après la remise, une fête était organisée. Une grande fête. « Bon alors, que vas-tu porter pour appâter Monsieur Silvensen ? » m'avait demandé malicieusement Léah, affalée sur mon lit, pendant que je fouillais mon armoire pour trouver la robe parfaite pour le soir-même. Je m'étais retournée. « Mais je m'en fiche de lui... » Je mentais très mal, surtout face à Léah, on se connaissait depuis le jardin d'enfants. « Oui, bien sûr... » J'avais finalement choisi une jolie robe noire bustier, talons hauts et Léah m'avait maquillée légèrement. J'étais fin prête. Arrivées à la fête, nous nous étions assises sur l'un des canapés, avec un verre. « Tu danses ? » J'étais en train de parler avec Léah lorsque Derek nous avait coupées pour me poser cette question. Pourquoi faisait-il cela ? Pourquoi était-il toujours aussi séduisant ? Il avait mis un jean et une chemise qu'il avait mise de façon mi-décontractée, mi-élégante. Léah et moi avions déjà commencé à boire, et je savais que je ne supportais pas bien l'alcool. C'était la fête après tout... autant en profiter. Je me levais en attrapant la main qu'il me tendait, et nous nous mirent un peu plus loin pour danser alors que je sentais le sourire satisfait de ma meilleure amie dans mon dos. Il me glissa à l'oreille « Tu es très jolie, Ayonah... comme toujours. » Ces deux derniers mots résonnèrent dans ma tête. Avait-il bu ? Non, il paraissait en total possession de ses moyens. Je le savais, j'étais en train de sourire bêtement tout en le fixant dans les yeux. Il me souriait, mais cette fois, pas d'un sourire arrogant ou supérieur, non il souriait sincèrement et totalement gentiment. Seulement, voilà, je ne savais pas si je pouvais me laisser aller à mes sentiments d'antan. Pouvais-je continuer de l'aimer en toute confiance ? J'allais bientôt le découvrir.

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J'étais très indécise quant à mon avenir. Et avec le conseil de Derek, car, oui, depuis la remise des diplômes, nous avions continuer à nous voir, et nous étions devenus « nous », je m'étais tournée vers une école de photographie et arts. Je n'étais pas sûre de m'y plaire. J'aimais faire des photos, j'aimais dessiner, peindre. Mais pourrais-je faire ça toute ma vie ? Aucune idée. Et puis, finalement , j'avais totalement accroché. Je me plaisais. Derek, lui, n'avait pas voulu faire d'études. Il avait beau avoir des notes correctes au lycée, il n'avait pas envie de s'embêter encore quatre ans en cours. Alors, il trouva un travail, et puis le jour de nos un an ensemble, il me fit une demande particulière. « Je travaille, Ayo, et j'ai économisé pour qu'on puisse avoir un chez nous. Tu me suis ? » Comme si j'allais lui dire non. Bien sûr que je le suivais. Je l'aurais suivi au bout du monde, je crois. Nous avons choisi notre appartement ensemble. Un appartement modeste, mais j'avais émis une exigence, je voulais un sorte de duplex avec notre chambre et une salle de bain si possible en haut. Nous avions trouvé notre bonheur en peu de temps. Le plus dur a été de le dire à Heaven. « Tu m'abandonnes ! » Je m'approchais de ma petite tête rousse et sécha ses larmes d'une main. Je faisais mes cartons pour partir emménager avec Derek et à neuf ans, elle ne comprenait pas que je devais faire ma vie. Que j'en avais dix-neuf et que je ne pouvais pas rester toute ma vie avec elle et notre mère. « Mais non, ma chérie, je ne vais pas être très loin de toi, et je viendrais très souvent. » ça avait été dur pour elle de l'accepter. Notre mère travaillait beaucoup pour essayer de nous offrir une belle vie. Elle était une bonne mère, excellente mère, mais la mort de notre père l'avait perdue. Elle faisait de son mieux. Heaven et moi savions qu'elle nous aimait, et c'était le principal. Mais, j'étais un peu une sorte de mère pour Heaven alors elle devait sans doute se demander comment elle allait faire sans que je m'occupe d'elle. Finalement, j'étais belle et bien partie vivre avec Derek, je ne pouvais pas abandonner l'idée d'emménager avec l'homme que j'aimais. Et puis, je tins ma promesse de venir la voir très souvent. Dès que je n'avais pas cours, je passais la prendre à l'école et nous passions la fin de la journée ensemble. Parfois, elle venait dormir à la maison, notamment quand Jill avait beaucoup trop de boulot pour rentrer à une heure décente. Je ne voulais pas abandonner ma petite sœur, et Derek l'avait bien compris. Je crois que Derek avait mis un point d'honneur à me faire des demandes particulières chaque année. Un an après, nous étions en train de regarder la télévision. Pour tout dire, nous étions surtout en train de discuter de notre relation, jusqu'à ce qu'il me dise « Comme si tu ne savais pas que je t'avais toujours aimé, même quand tu me traitais de con arrogant ! » En entendant cela, je fus sûre de moi : j'avais l'impression de pouvoir l'aimer toute ma vie sans jamais m'arrêter. C'était lui et personne d'autre. J'eus un sourire avant de lui répondre. « Ce que tu étais. Et quand tu me traitais de peste prétentieuse » Il sourit à son tour. « Tu l'étais aussi, tu sais. » Et je pense que c'était vrai. J'étais autant une peste prétentieuse que lui était un con arrogant. Mais nous avions grandi, changé, et nous nous aimions. « Je veux t'épouser, je veux avoir plein d'enfants avec toi, tu es la femme de ma vie, Ayonah. Épouses-moi ! » Que pouvais-je répondre à ça, mis à part un « Je t'aime » et que pouvais-je faire mis à part l'embrasser ? Rien ! Alors c'était ce que j'avais fait. J'avais accepté sa demande en mariage avec les larmes aux yeux. Des larmes de joie.

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Le mariage était prévu pour le vingt mars deux mil. Mais, six mois après sa demande, en septembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, vint une annonce imprévue. « Derek, nous ne pouvons pas nous marier » Sa réaction se fit sans attendre, il avait l'air comme en arrêt. « Tu plaisantes ? » Non, je ne plaisantais pas. Enfin qu'à moitié... Je savais que l'annonce que j'allais lui faire allait lui plaire. « On se marie dans six mois, Derek, et je veux pas me marier en ayant un ventre de femme enceinte ». Un sourire se dessina sur ses lèvres. J'étais tombée enceinte par total accident mais que ce soit lui ou moi, nous voulions cet enfant. Il me prit dans ses bras immédiatement. « Nous nous marierons après la naissance, je te le promets, je porterais ton nom. » Ça, c'était quelque chose de sûr et certain. Je ne comptais pas abandonner l'idée d'épouser l'homme de ma vie. Une autre personne qui fut heureuse de cette grossesse fut Heaven. J'en fus étonnée. Aussi étonnée que sa réaction lorsque je lui avais dit que j'allais me marier avec Derek. Mais elle m'avait simplement répondu « J'aime bien Derek ». ça, oui, je l'avais vu. Et j'en étais plus que contente. Que Derek soit accepté par ma mère et par ma sœur était quelque chose de très important pour moi. Je l'avoue sans mal, et Derek en avait conscience, si Jill et Heaven ne l'avaient pas accepté, je ne serais sans doute jamais resté avec lui. Heureusement pour moi, toutes deux l'adoraient et j'attendais un enfant de lui. Enfant qui naquit le deux juin deux mil. Enfant, petite fille, que l'on prénomma Emma Arizona Silvensen. Maintenant que notre fille était née, nous étions libres de nous marier. Pendant ma grossesse, j'avais continué d'organiser le mariage. Seule la robe était légèrement impossible à essayer tellement mon ventre avait grossi. Mais finalement... « Je vous déclare mari et femme. » Ce fut trois mois après la naissance d'Emma, le vingt septembre deux mil. On dit que le mariage est le plus beau jour de la vie d'une femme. Je ne saurais trop dire car la naissance de notre fille a été un événement merveilleux pour nous. Nous pensions même à avoir un second enfant. Notre rêve de fonder notre famille se réalisait. Je faisais mes études en parallèle, il me restait encore un an avant d'avoir mon diplôme mais je travaillais en tant que serveuse en même temps. Derek, lui, venait de trouver un travail à plein temps. Un travail qui lui plaisait d'après ce qu'il me disait. Nous étions devenus la famille que nous voulions. Une famille heureuse.

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Lorsque j'obtins mon diplôme de l'école de photographie et d'arts, en deux mil un, Derek et moi avons pensé qu'il était temps de se trouver un nouveau chez-nous. Une petite maison où nous pourrions agrandir notre petite famille. Un second enfant, nous en rêvions totalement. Nous essayions mais malheureusement, à la suite d'une visite chez le gynécologue, ce dernier m'annonça que le nombre de mes ovules, ou je ne sais pas trop, était anormalement bas. J'avais déjà Emma, mais je ne me voyais pas avec sans un autre enfant. Et, finalement, Derek avait raison : les miracles se produisent. Au mois d'avril deux mil deux, j'annonçais ma seconde grossesse. Et j'avais l'impression d'être encore plus amoureuse de mon mari chaque jour. Cependant, je peux vous dire que ma seconde grosse a été difficile. Notre seconde fille est née prématurément puisqu'elle est née le dix novembre deux mil deux, soit à sept mois de grossesse. Cette seconde enfant, nous la prénommèrent Lynn Trisha Silvensen. Ce qui donnait « Ynn » dans la bouche de la petite sœur, Emma, qui venait d'avoir deux ans et avait l'air parfaitement ravie d'avoir une petite poupée pour s'amuser. Car c'était bien ce qu'était Lynn pour Emma au début. Toutes les deux avaient hérité de mes cheveux bruns-roux, tandis que toutes deux avaient hérité des yeux bleus-gris de leur père. J'adorais les yeux de leur père, je crois même que c'était eux qui m'avait faite tomber amoureuse de lui. Quoi qu'il en soit, j'avais la vie dont j'avais toujours voulu. Mais j'aurais du savoir que le bonheur était éphémère. Ou que tout ce bonheur, je ne le méritais pas. Il n'y avait que cette raison là de possible au drame qui nous était arrivé ensuite.

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C'était ce drame qui m'avait totalement changée aujourd'hui. Ce fut le dix janvier deux mil onze. Je me souviendrais à jamais de cette date. J'avais récupéré Emma et Lynn à l'école et nous étions rentrées à la maison. Je leur avais dit d'aller dans leur chambre pendant que je préparais leur goûter. Et puis j'avais entendu la porte s'ouvrir. Lorsque je m'étais retournée, ma sœur me faisait face. Sauf que ce n'était pas elle. Je sais, ce que je dis est bizarre mais, croyez-moi, la femme que j'avais en face de moi n'était plus ma sœur. Une arme dans la main, elle me fixait. Et voir sa sœur pointer une arme sur vous, ça fait froid dans le dos, j'étais totalement pétrifiée. « Qu'est-ce que tu fous, Heaven ? » J'essayais de garder mon calme. J'essayais de comprendre pourquoi ma petite sœur avait une arme dans la main, j'essayais de comprendre ce qui passait dans la tête de ma petite sœur que j'avais toujours défendue et protégée pour venir me menacer ainsi. Heaven restait impassible. Je ne comprenais pas ce qu'il se passait. « Je fais ce que j'ai à faire... » Mais qu'est-ce qu'elle racontait ? Je rêvais là, ce n'était pas possible... ma sœur ne pouvait pas être une tueuse. Que s'était-il passé pour qu'elle en arrive là ? Il était vrai que cela faisait des mois qu'on ne s'était pas vues mais tout de même... En fait, il y a huit mois, elle nous avait annoncé qu'elle partait en France pour un an. Je ne saurais plus vous dire pourquoi en fait. Je regardais rapidement autour de moi. « Si tu cherches Emma et Lynn, il est trop tard pour elles. » Je n'en croyais pas un mot, elle ne pouvait pas avoir tuer ses nièces de sang-froid. Pas sans que je l'ai entendue. Non, ce n'était pas possible. Mes filles étaient dans leurs chambres, et elles y resteraient. Je ferais ce qu'il faut pour les protéger. « Heav', arrêtes, pourquoi tu fais ça, hein ? Pourquoi ? » Si j'avais essayé de garder mon calme, cette fois, le dernier mot avait été prononcé dans un cri, essayant de retenir mes larmes. Comment ma sœur avait-elle pu en arriver là ? « Je n'ai pas le choix, Yonah » Je vis qu'Heaven tremblait, je vis qu'elle avait presque les larmes aux yeux, elle aussi. Que voulait-elle dire quand elle disait qu'elle n'avait pas le choix ? J'allais lui poser la question mais je n'en eus pas le temps. « Maman ?! » Quand j'entendis mes filles m'appeler alors qu'elles arrivaient dans la cuisine, je ne pus m'empêcher de crier un « Noooon ! » comme si je savais ce qui allait suivre, comme si je savais que ma sœur appuierait sur la détente. Pourtant, au fond, je voulais croire qu'elle ne le ferait pas... Comme quoi, on se trompait toujours sur les gens qu'on aimait le plus. J'avais couru vers mes filles pour les protéger. Je m'étais précipitée mais il était trop tard, une balle était partie et avait déjà touché Lynn, tandis que l'autre avait frôlée mon bras pour venir se loger dans la poitrine d'Emma. Le désespoir m'avait envahie immédiatement. J'étais incapable de faire autre chose que de tenir les corps de mes filles alors que ma sœur était sortie presque calmement de l'appartement. Je ne pouvais pas croire ce qui venait de se produire. Heaven et moi étions si proches... comment avait-elle pu en arriver là ? Tuer sa propre famille, ses propres nièces, des enfants de onze et neuf ans... presque comme un robot, j'avais fini par appeler une ambulance. Quand les secouristes étaient arrivés, ils avaient soignés mon bras et m'avaient dit, comme si ça pouvait me consoler, que mes filles n'avaient pas souffert, qu'elles étaient mortes sur le coup. Ils croyaient vraiment que j'allais me sentir moins mal si ils me disaient ça ? Quels idiots ! Aucune parole au monde ne pourrait consoler une mère qui vient de perdre ses deux petites filles. Encore moins quand c'est leur tante qui les avaient froidement assassinées. Ils étaient partis, emmenant le corps de mes enfants. Je n'avais pas eu l courage de les suivre, je restais simplement sur le canapé, pleurant toutes les larmes de mon corps. Il m'a semblé que des heures et des heures étaient passées quand Derek franchit enfin le pas de la porte. Je ne bougeais pas. « Ayonah, qu'est-ce qui se passe ? » Recroquevillée sur le canapé, je ne lui donna aucune réponse. Après une minute d'hésitation, il réalisa que quelque chose clochait dans cette maison, qu'elle était étrangement vide. Je relevais la tête vers lui, sans vraiment le voir. « Où sont les filles, chérie ? » Oui, où étaient Lynn et Emma ? C'était une bonne question. Les larmes redoublèrent. Où étaient-elles ? Je n'arrivais toujours pas à croire ce que je devais annoncer à mon mari. Il serait sans doute aussi dévasté que moi. « Heaven » fut la seule chose qui sortit de mes lèvres. « Les filles sont avec elle, c'est ça ? C'est rien, pourquoi tu pleures ? » Je secouai la tête vivement en signe de négation alors qu'il s'était assis près de moi et m'avait pris la main. « Tu étais injoignable... » Il s'assit près de moi et me prit dans ses bras. Je ne voulais pas l'accuser ainsi, mais il était vrai que je n'avais pas réussi à l'avoir au téléphone alors que je tentais de l'appeler, les mains tremblants et les yeux pleins de larmes. « Je sais, mon téléphone était éteint. » Mes larmes ne s'arrêtaient plus. Je ne savais pas que je pouvais pleurer ainsi. Mais c'était peut-être normal vu la situation. « Derek, elles sont mortes... Heaven les a tuées... J'ai rien pu faire... Je suis désolée... » Je me mis à répéter « je suis désolée » plusieurs fois de suite. Je n'arrivais pas à croire que mes filles étaient mortes par ma sœur. Non, je ne pouvais pas y croire. Pourtant, la blessure sur mon bras gauche était bien là pour le prouver... pourtant, la douleur que je ressentais dans la poitrine était bien présenté. La culpabilité aussi, car mes filles, nos filles, avaient été tuées de la main de ma propre sœur. Une sœur que j'avais toujours aimée et protégée envers et contre tout. Derek s'était pétrifié, puis il m'avait fait basculer contre son torse, et nous étions restés ainsi toute la nuit, pleurant tous les deux.

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Depuis ce jour, je n'ai eu de cesse d'essayer de comprendre le geste de ma sœur. Son « je n'ai pas le choix, Yonah » résonnait dans ma tête tous les jours, toutes les nuits. Pourquoi n'avait-elle pas le choix ? Je ne vivais que pour comprendre, et que pour la retrouver. Me venger. Je voulais la faire souffrir comme elle, elle m'avait fait souffrir. Derek ne me comprenait pas. Il ne cessait de me dire que j'avais changé et que je n'arriverais jamais à faire mon deuil si je continuais mes recherches. Il me disait cela mais je savais que lui non plus n'arriverait jamais à faire son deuil. Certains personnes nous disaient qu'on pouvait faire d'autres enfants, que nous n'avions que trente-deux ans. Mais nous voulions Emma et Lynn, et il était hors de question pour nous de les remplacer. Un mois après leur décès, j'ai découvert la division, leur loi de tuer pour devenir agent. Et j'avais enfin compris que Heaven en faisait partie. En parallèle, j'avais découvert la corporation et, sans hésitation, j'avais décidé d'y entrer. J'avais toujours été sportive, et athlétique. Mais, je devais l'avouer, mon entraînement était difficile. Mon entraîneur avait failli perdre patience à plusieurs reprises, notamment et surtout lorsqu'il m'avait appris à me servir d'une arme. Me battre, je savais le faire, grâce aux cours de combat que j'avais pris au lycée, mais me servir d'une arme, ça, c'était autre chose. Finalement, mon entraînement était complet. J'étais fin prête à être une membre à part entière de la corporation. Et une chose m'animait : la vengeance. Je voulais tellement me venger de Heaven. À cause d'elle, ma vie avait basculé. À cause d'elle, ma vie s'était écroulée. Et elle devait payer pour ça. J'étais prête à tout. Même si Derek s'éloignait de plus en plus de moi. « Tu peux m'expliquer ce que tu fais ? Tu rentres tard, tu pars très tôt... Tu me trompes, c'est ça ? » Les questions de Derek me mettaient hors de moi. Comment pouvait-il penser que je le trompais ? Je n'avais jamais aimé que lui. Et je ne pourrais aimé que lui toute ma vie. Je refusais de le perdre mais j'avais rejoint la corporation et je ne devais pas le dire à mon mari. C'était mon secret, et je voyais bien que tous mes mensonges nous éloignaient. Même si à dire vrai, la perte de nos enfants nous avaient éloignés. Je restais persuadée qu'il m'en voulait de n'avoir rien pu faire pour eux face à ma petite sœur. Peut-être que je me trompais. En tout cas, j'espère de tout cœur que mon mariage ne connaîtrait pas de fin. La mort de mes filles m'avait totalement changée, c'était sur mais je savais que si je perdais mon mari, ce serait la fin d'Ayonah Sydney Grey-Silvensen.